Des moteurs de recherche gratuits et plus puissants que Google ?

L’accès grand public à internet en France a démarré il y a environ 25 ans. Les usages de l’époque étaient différents : ordinateurs, temps de connexion limité, lenteur et surtout, une découverte progressive du web. Peu de sites web étaient des références, beaucoup de services (mail, médias) étaient décentralisés faute d’acteurs dominants. Dans cet écosystème nouveau sont ensuite apparus les moteurs de recherche, leur mission était de guider l’internaute dans ce réseau de sites web. Soit par un système d’annuaire, soit par une interface de recherche par mot-clé.

C’est au final cette dernière qui s’est imposée : un index de sites web auto-alimenté et une interface simple proposant une liste de résultats à la recherche de l’internaute.  

Depuis plus de 15 ans, c’est naturellement Google qui s’est imposé. Aujourd’hui une marque proposant une variété de services, son premier produit est bien son moteur de recherche, aujourd’hui dominant : 91% de PDM aussi bien en France que dans le monde.

Mais c’est Google lui-même qui (sous contrainte) au moment de l’installation de son navigateur Chrome invite l’utilisateur à choisir un moteur de recherche gratuit sans valoriser le sien. Il y a-t-il un intérêt pour l’internaute ?

Existe-t-il un moteur de recherche meilleur que Google ?

Du point de vue de l’internaute, c’est la qualité de l’expérience qui fera la différence. Google a l’avantage d’être utilisé au quotidien, de proposer des résultats à jour et dans des formats variés. Les alternatifs sont ils plus puissants ou même meilleurs que l’acteur dominant ?

Bing de Microsoft

Prenant le contre-pied de l’interface épurée de Google, Bing se présente comme un portail pour l’internaute : fond d’écran personnalisable, page d’accueil avec actualités, météo, circulation… avant même une recherche.

Bing donne une large variété de choix à l’internaute : 

  • en restant dans l’interface du moteur : résultats d’images, de vidéos, de produits sponsorisés et d’extraits de contenus de sites
  • en valorisant les pages web dans ses résultats : extraits enrichis, sites recommandés pour approfondir « Explorez davantage », carrousel d’Autres questions posées

Depuis début 2023, Bing propose un module « Conversation » – un chatbot alimenté par ChatGPT afin de répondre à l’internaute directement et d’une manière conversationnelle, plutôt que par une liste de résultats. Assez bien intégré au moteur de recherche, ce module n’a pas pour autant accru la popularité de Bing qui reste à des parts de marché de ~5% en France et de 7% dans le monde.

Sur d’autres pays : l’indispensable Baidu

Le web est une technologie universelle, mais dans les faits internet est structuré par les frontières nat, les langues et les usages. La Chine a un écosystème web différent du notre – notamment un usage mobile plus ancien et plus complet, l’application WeChat est un écosystème à elle toute seule. Les applications mobiles et les sites web e-commerce en Chine sont très déroutants pour nos habitudes.

En Chine, le moteur national Baidu domine, complété par d’autres moteurs nationaux (HaoSou, Sogou) totalisant ensemble 80% du marché chinois. Baidu repose sur un fonctionnement particulier : à un moteur de recherche à l’index autonome s’ajoute une surcouche manuelle. Les marques bénéficient d’encarts réservés permettant de mettre en avant leurs produits d’une manière contrôlée.

Qu’apportent les moteurs alternatifs ?

Un modèle financier différent

Yep.com, construit par la société Ahrefs connue pour sa suite d’outils SEO, propose un modèle où 90% des revenus publicitaires générés seront reversés aux éditeurs de sites, prenant le contre-pied de Google Ads. L’interface est pour l’instant simple et les résultats de recherche peu réactifs pour la France, le moteur est en développement et construit son propre index.

La confidentialité de vos données

Lancé en 2008, DuckDuckGo est le plus ancien et le plus stable des moteurs alternatifs. Son axe différenciant consiste à ne pas utiliser les données de ses utilisateurs, permettant une expérience de recherche neutre et sans personnalisation.

Le discours est offensif : « Les entreprises utilisent vos données pour créer des profils détaillés vous concernant, dans lesquels on trouve même des informations sur vos amis et votre famille. Ainsi, elles peuvent nous bombarder de publicités si douteuses qu’on a l’impression que nos appareils écoutent nos conversations ».

Par rapport à Bing et Google, les résultats sont épurés : on retrouve les « 10 liens bleus » des recherches simples d’il y a 10 ans, avec un minimum de résultats enrichis ou issus de moteurs parallèles (images, actualités, vidéos).

L’écologie

Populaire en France, Ecosia s’engage à investir leurs bénéfices pour financer des actions climatiques, principalement des plantations d’arbres dans le monde entier. Chaque recherche dans un moteur consommant de l’énergie (et chaque action sur internet, d’une manière générale), le parti pris d’Ecosia est de compenser l’action de ses utilisateurs.

Le Made in France

Qwant met aussi en avant la confidentialité des données comme argument principal : « Le moteur de recherche qui ne sait rien sur vous ». Développé en France, adopté par principe par l’administration française, sa popularité est progressive.

Pour ces trois candidats, les résultats sont assez proches visuellement et dans leur pertinence. Ne disposant pas d’un index autonome, ces moteurs s’appuient sur l’index de Bing pour construire leurs résultats (en partie ou en intégralité), sans proposer son interface avancée.

Le choix d’un moteur alternatif à Google se fait en partie par conviction personnelle, face aux défauts supposés de Google.

Google est-il menacé par des moteurs meilleurs que lui ?

Non.

  • On s’en sert sans s’en rendre compte – c’est le moteur par défaut sur les navigateurs, sur les smartphones… Son adaptation constante à l’évolution des usages le rend pertinent.
  • Les internautes consomment de plus en plus de vidéos ? Les résultats de recherche en affichent davantage et s’appuient sur TikTok en plus de YouTube.
  • Les contenus les mieux positionnés sont des pages de remplissage sans information accessible ? Google favorise les contenus « non-SEO » issus de réseaux sociaux et de forums, voire proposer une réponse directe par la Position 0 ou la future SGE
  • Le public plébiscite ChatGPT ? Google développe et déploie Bard, corrigeant les nombreuses limites du chatbot d’OpenAI 
  • ChatGPT source ses réponses et sort SearchGPT en novembre 2024 ? Ce sont des modules pour les utilisateurs payants, des ajouts à l’usage naturel que font les utilisateurs de l’outil.

Pour l’avenir :

  • Des rumeurs récurrentes annoncent un possible moteur de recherche d’Apple, mais jamais suivi d’effets : c’est au mieux une technologie pour rendre la recherche interne (Spotlight) de son système d’exploitation plus efficace, mais le partenariat entre Google et Apple est de notoriété publique et reconduit régulièrement.
  • Yahoo, un des leaders du marché d’il y a 20 ans a été dormant au fil des différents rachats, mais a récemment annoncé son retour pour début 2024
  • De nouveaux moteurs apparaissent ponctuellement (Neeva, You, Presearch) mais adressant des besoins de niche, donc peu susceptibles d’acquérir des parts de marché significatives à court terme

C’est au final l’usage qui fait la part de marché. Un moteur de recherche plus puissant que Google est à la fois peu probable et surtout sans grand apport pour l’internaute. Pas de « date d’expiration » pour Google en vue. Les stratégies SEO n’auront pas à s’adapter à des changements de plateforme avant longtemps.

Pour marque-pages : Permaliens.

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